La cuisine, un moyen de transmission culturelle

Article Ă©crit par Malika Nguon

À la maison, le rice cooker trĂŽnait sur le plan de travail de la cuisine. Qu’il soit rempli de riz dĂ©jĂ  cuit ou prĂȘt Ă  chauffer, il faisait partie de notre quotidien.

La cuisine comme terrain de jeu

J’ai grandi avec un Papa qui passait son temps à cuisiner et à manger !

Tout tournait autour de la nourriture !

 

Il s’amusait Ă  twister ses plats avec des Ă©pices : il aimait ajouter de l’anis Ă©toilĂ©e dans son riz, saupoudrer de poudre de curcuma la semoule pour la rendre plus colorĂ©e, mettre du cumin dans ses biscuits


Quel spectacle pour moi ! Je l’observais expĂ©rimenter de nouveaux plats, marier les saveurs d’Asie aux plats traditionnels français, goĂ»ter ses marinades, rectifier l’assaisonnement de ses plats, ranger ses Ă©pices, et sentir l’odeur de la coriandre.

Comme si humer cette herbe aromatique pouvait le ramener tout droit vers son enfance, au petit royaume des sourires.

J’ai toujours admirĂ© sa patience Ă  cuisiner pendant des heures par amour de faire plaisir. Pour lui, c’était comme une mĂ©ditation active.

Pas besoin de parler. Juste ĂȘtre lĂ , ici et maintenant.

Une histoire de transmission grĂące Ă  la cuisine

Mon Papa aimait prĂ©parer de savoureux plats mais, par dessus tout, il aimait manger ! C’était culturel. Je suis reconnaissante d’avoir hĂ©ritĂ© de cette gourmandise. Du coup, j’en ai fait mon mĂ©tier : je suis cuisiniĂšre. Je me demande parfois si mon choix n’a pas Ă©tĂ© orientĂ©, influencĂ© par l’envie de me rapprocher de lui.  Si on voulait parler Ă  notre pĂšre, il fallait passer par la nourriture ou aller en cuisine. 

“Quel est ton lien à l'Asie ?”

Quand je cuisine pour les autres, je partage un peu de mon histoire, de mes racines et de lui. Mes plats sont assaisonnĂ©s et imprĂ©gnĂ©s de cette double culture. Je me suis inspirĂ©e et mise à imiter sa gestuelle, ses placards.

Nono, de son surnom, s’exprimait peu sur ses racines et son histoire par pudeur. L’émotion Ă©tait si prĂ©sente quand il racontait ses bribes de vie de-ci de-lĂ .

 

Par manque de temps et prenant sûrement pour acquis les plats de Papa, je ne sais pas cuisiner cambodgien. Je ne connais pas suffisamment le nom des ingrédients en khmer, ni appris à les utiliser.

Je fais un peu Ă  ma sauce quand je cuisine asiatique, selon mes goĂ»ts et souvent avec les mĂȘmes produits.

Nous partons en famille, avec mes enfants et mon amoureux pour la premiĂšre fois au Cambodge dans quelques jours. J’ai cette envie trĂšs forte de passer du temps en cuisine avec les tatas et les tontons pour pouvoir, Ă  mon tour, rĂ©pandre ces odeurs de plats traditionnels khmers Ă  la maison. Puisque c’est surtout par la nourriture que la transmission se fait dans les familles asiatiques.

 

Je te rejoins bientĂŽt petit royaume et il me tarde de pouvoir retrouver tes odeurs, tes couleurs et tes saveurs.

Pour aller plus loin : 

Malika Nguon est cuisiniÚre, Franco-Cambodgienne, auteure notamment de « Cuisine et fermentation », aux éditions Ulmer.

Écoutez l’Ă©pisode de podcast le GoĂ»t du Monde dĂ©diĂ© Ă  Malika Nguon disponible sur RFI.fr : « Niam BaĂŻ: par la cuisine: la voix des absents, le goĂ»t de la transmission« 

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